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Destination nowhere
11 mars 2007

Quand j'étais chanteur

Cet après midi, nous sommes allé voir la grand-mère de S*cophante que sa maman a malheureusement dû confier à une maison de retraite compte tenu de sa maladie.

La première fois que je suis rentrée dans une maison de retraite, c'était également pour aller la voir mais c'était à un autre endroit, je me souviens avoir été très choquée de voir toutes ces personnes dont la plupart étaient en fauteuil roulant, se livrer à différentes activités qu'elles seules pouvaient comprendre.

Lorsqu'elle est entrée dans cette nouvelle maison, lors de la première visite, j'ai eu le même malaise. Impossible de regarder les gens dans les yeux. Impossible de donner un sens au silence de la plupart lorsque l'on s'adressait à eux pour les saluer... Surdité? Mépris? Détresse? Indifférence? Ou tout simplement, étaient-ils dans leur monde, un monde dans lequel plus personne ne peut pénétrer?
Penser que beaucoup de ces personnes sont seules, sans famille ou abandonnées par celle-ci, penser que dans la majorité des cas, l'espoir qu'il leur reste est complètement vain.

J'ai eu de la peine, cette après midi quand la dame qui partage la chambre de la grand-mère de S*cophante nous a expliqué qu'elle n'était là que provisoirement, le temps d'aller mieux et de rentrer chez elle... elle avait été à l'hopital, on l'avait emmené ici, pour se soigner, mais elle rentrerait... J'ai repensé aux projets fous qu'avait mon grand-père deux semaines avant sa mort, lorsqu'il me parlait des voyages qu'il entreprendrait dès que sa maladie de Parkinson serait soignée... je l'écoutais sans y croire, j'avais malheureusement raison.

Tout ça pour dire que la première impression qui se dégage de tout ça, c'est la tristesse.

Et puis, évidemment, le pire, c'est pour S*cophante et sa famille, qui vivent l'évolution de la maladie de sa grand-mère depuis plusieurs années... Tout ces souvenirs ensemble qui les font souffrir et qu'elle a oublié, toutes ces larmes qui sont prêtes à gicler et que tout le monde retient pour ne faire de peine à personne.

Vous l'aurez compris, malgré le plaisir de chacun de la retrouver, ce n'est pas toujours la joie.

Et pourtant... aujourd'hui au premier étage, c'était concert. Les mamies et les papys (surtout les mamies) alignés en rang d'oignons, les fauteuils roulants à côté des fauteuils sans roues, ces visages que je commence à reconnaître et qui me font beaucoup moins peur que la première fois. Ces tics propres à chacun, de celle qui passe son temps à se caresser le menton, à celle qui se balance d'avant en arrière, en passant par celle qui s'endort toutes les soixantes secondes chrono.
Un monde à part.

Et puis la star arrive. Jeune mais un peu le profil du personnage de Depardieu dans "Quand j'étais chanteur"... un peu la loose mais heureux d'être là, face à un fan club parfois déchaîné :) qu'elles se lèvent pour danser ou qu'elles balancent les bras de droite à gauche dans leur fauteuil tout en prenant soin d'éborgner la voisine, elles étaient heureuses d'être là, à écouter des chansons d'amour à l'eau de rose.
Ce spectacle qui aurait facilement pu virer au pathétique s'est en fait avéré magique. Cette salle respirait le bonheur... pas un bonheur simulé pour faire bonne figure, non, ces gens étaint heureux de faire les choeurs sur "pour un flirt, avec toi", ces mots universels les touchaient encore. Ces gens rêvent encore à l'amour, à la vie. Cet après midi, ils étaient fascinants.

Quant à la grand-mère de Syc*phante, elle ne parle quasiment plus, elle met parfois deux paires de chaussures, mais elle rit, elle danse, elle chante (!), elle embrasse sa fille, elle conserve des réflexes de maman, elle aide le personnel à débarasser la table, elle sourit souvent, elle s'intéresse à ce que font les gens autour d'elle, elle vit sa vie, un peu en parallèle de la nôtre mais elle vit et ne semble pas malheureuse dans son monde...

Finalement, je me dis que si j'arrive avec S*cophante à un âge suffisamment avancé pour qu'une assistance quotidienne nous soit nécessaire, nous nous accomoderons sans doute des dimanches après midi, en compagnie d'un chanteur un peu ringard qui nous rappelera les tubes du début du siècle sur un playback qu'il sera lui-même obligé de déclencher, faute de technicien. C'est aussi ça, la vie, et ça voudra dire qu'on a bien vécu :)

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Commentaires
D
Hé bien, c'est très courageux Beat!
B
et oui ce sont des scènes hors du temps , je travaille dans une maison de retraite , et je confirme que parfois nous assistons à quelques minutes de miracles , pur moment de bonheurs de voir leurs yeux pétillés et leur plaisir . et ça me rassure pour mon futur et oui on y pense
M
Bonjour,<br /> Je vous invite à référencer votre blog sur mon annuaire :<br /> http://www.marinamode.com/annuaire/blog-508.html<br />
S
"nous nous accomoderons sans doute des dimanches après midi, en compagnie d'un chanteur un peu ringard qui nous rappelera les tubes du début du siècle sur un playback qu'il sera lui-même obligé de déclencher"<br /> <br /> Du moment que c'est du Radiohead, ça sera bien :)<br /> <br /> Merci pour ce post... ;)
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